Cette semaine, nous allons à la rencontre de Mickaël Réault, fondateur de Sindup et sans contredit acteur international important dans le domaine de l’intelligence d’affaires!
Autour de la plateforme de veille collaborative Sindup analysant plus de 50 millions de sources d’information internationales, Mickaël a tissé ces 15 dernières années un réseau de partenaires pluridisciplinaires issus de l’intelligence économique, la veille, l’innovation et la formation pour répondre aux enjeux stratégiques des organisations grâce à un suivi des tendances et une détection des événements importants, qu’il s’agisse de risques ou d’opportunités. L’Intelligence Artificielle (IA) permet alors de gagner en productivité et en réactivité face à la surinformation, tout en favorisant l’agilité et la transformation dans une démarche d’Intelligence Collective (IC).
Au début de l’année 2020, Mickaël a annoncé l’ouverture d’une application dédiée aux Observatoires avec un ensemble d’associations professionnelles formant un réseau de confiance, dont la mission est de contribuer au partage des connaissances et des analyses d’experts avec un large public. Objectif : aider au décryptage des nombreuses transformations en cours et faciliter ainsi l’appropriation des opportunités et l’anticipation des risques. Les observatoires sont en libre accès.
L’équipe de Phar lui à posé quelques questions!
1. Quels sont les GRANDS enjeux auxquels tu t'intéresses présentement et qui touchent les organisations ?
Les 17 Objectifs de Développement Durable (ODD) énoncés en 2015 par l’ONU donnent une vue d’ensemble des priorités universelles du 21e siècle. Qu’il s’agisse d’enjeux sociétaux, sociaux ou environnementaux, ce référentiel s’est imposé progressivement comme une référence commune internationale que l’on peut relier ensuite aisément à différents contextes. Par exemple dans les entreprises, cela se traduit par la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) qui a des répercussions à tous les niveaux : réglementation, management, finance, comptabilité, stratégie, communication, chaîne de valeur et de production, modèle économique, raison d’être, etc.
Ces enjeux sont liés à de nombreux concepts clés qui progressivement s’installent dans les préoccupations des acteurs économiques, d’abord pour les maîtriser, ensuite pour les mettre en œuvre : économie circulaire et inclusive, économie sociale et solidaire, ville durable, ancrage local, low tech, sobriété énergétique et matérielle, impact, holacratie, transversalité, pluridisciplinarité, éthique…
Tout ceci finalement est en rapport avec la « transition » ou le « point de bifurcation » que nous traversons. Notre rapport au réel et notre capacité à collaborer pour aborder la complexité et relever ces challenges dans les meilleures conditions possibles seront déterminants dans les prochaines années et décennies. Par conséquent, je considère aujourd’hui que ces grands enjeux devraient attirer toute notre attention.
2. De quelle façon les organisations peuvent-elles adopter des bonnes pratiques pour améliorer leurs perspectives sur ces enjeux?
Développer la curiosité et la sensibilité à ce que l’on appelle les « signaux faibles » par la « socio-perception » comme le nommait le sociologue Alain De Vulpian, peut être amorcé par des lectures, des conférences, des ateliers ou encore des séminaires. Outre la sensibilisation, les sujets à suivre sont tellement nombreux, ainsi que les nouvelles connaissances à acquérir et les expérimentations à observer, qu’il s’agit d’organiser une démarche de veille stratégique et collaborative puis de l’animer au sein des équipes dans la durée.
Cette capacité à acquérir les bonnes informations et à les assimiler sous forme d’intelligence collective est au cœur des organisations adaptatives, plus à même d’épouser les changements de paradigme. Un programme de formations internes permet alors de monter en compétence autour des outils et des processus pour capter, organiser, analyser et partager l’information efficacement. L’objectif est d’aider dans la prise de décision, déclencher des actions et capitaliser des connaissances. L’information est partout et représente plus que jamais le carburant indispensable aux organisations vivantes et apprenantes.
3. Quelles sont tes observations sur l'utilisation de l'intelligence de marché en organisation?
La demande est forte et en croissance permanente. Il y a encore une quinzaine d’années, l’intelligence marché était réservée aux grandes entreprises à destination quasi exclusivement de la direction générale. Progressivement la démarche s’est vulgarisée et les solutions sont devenues plus accessibles avec l’émergence des logiciels hébergés ne nécessitant aucun déploiement informatique (SaaS). Puis avec l’explosion du nombre de sources d’informations, des volumes de publications et la montée en puissance des réseaux sociaux, l’infobésité a renforcé le besoin de filtrage automatisé.
Aujourd’hui nous constatons un nouveau facteur qui entre en ligne de compte : la démultiplication des sujets clés à suivre pour ne pas décrocher et rester dans la course ! Encore plus récemment, avec la crise sanitaire, les organisations ont basculé tout ou une partie de leurs activités en télétravail, ce qui nécessite le recours à des outils collaboratifs pour digitaliser la veille et le partage d’informations.
Nous sommes donc entrés dans une phase de déploiement à plus grande échelle de l’intelligence marché. Les dispositifs existants sont élargis à toutes les équipes pour, à la fois, accéder à la connaissance marché disponible, mais aussi être en capacité de réaliser une veille plus locale à l’échelle d’un projet ou d’un département. Quant aux organisations qui n’étaient pas équipées et formées, elles rattrapent progressivement leur retard en bénéficiant des nombreux retours d’expérience désormais disponibles et documentés.
4. Quelles sont tes perspectives sur l'évolution des outils et pratiques en lien avec l'intelligence de marché?
Les outils sont en perpétuelle évolution pour gagner en productivité et répondre aux différents usages au sein des organisations qui peuvent varier selon l’environnement de travail en place. Cela requiert une écoute permanente de la communauté des utilisateurs pour apporter les meilleures réponses possibles. Il me semble que ce processus est bien maîtrisé et que le marché du logiciel a considérablement progressé en matière d’expérience utilisateur et d’innovation continue depuis l’avènement du mode hébergé.
Cependant le facteur humain joue un rôle prépondérant dans la marge de progression qui consiste à tirer le meilleur parti de la technologie au service de la performance et de l’atteinte des objectifs d’une organisation. C’est pourquoi je considère essentiel de développer progressivement les compétences de toutes les équipes au sein des organisations par des programmes de formation adaptés. L’accompagnement et les services associés à la démarche d’intelligence marché sont également des clés de succès pour évoluer vers un modèle d’organisation apprenante. Cette transition nécessite du temps, l’effort est permanent et doit s’inscrire dans la durée. C’est pourquoi le soutien et l’implication de la direction générale sont incontournables.
5. Sur une note plus personnelle, quels sont les éléments qui t'ont amené à exercer ce métier?
Le choix du métier d’entrepreneur est le fruit d’une envie permanente de mettre en œuvre les idées et d’expérimenter de nouvelles solutions. Le choix du secteur du numérique a été le fruit d’une passion qui s’est traduite par une orientation universitaire en informatique industrielle. Et finalement, c’est à travers l’aventure Sindup que le choix de l’activité de veille et d’intelligence marché est né d’un constat en 2004. Nous disposions alors des premiers moteurs de recherche qui donnaient accès à de nombreuses sources d’informations, mais à l’inverse, il semblait alors manquer un système proactif, capable de prévenir de la publication d’une nouvelle information pertinente. Finalement, l'idée de départ a été de concevoir un moteur de recherche permanent, personnalisé et apprenant.
A cette époque je me suis inspiré d’une expérience précédente, ayant travaillé à la conception d’une salle de marché en temps réel. Il s’agissait d’un progiciel pour Traders et Brokers qui analysent les cours de bourse afin de prendre des décisions d’investissement à partir de flux financiers en provenance d’une quinzaine de pays. L’infrastructure et le traitement des flux d’information issus du Web ont alors fait l’objet d’une phase de recherche et développement qui reprennent les concepts et principales technologies mises en œuvre dans la finance mais cette fois-ci pour traiter de l’information textuelle.
L’expertise en veille stratégique et en intelligence marché s’est alors développée au fil des années, en accompagnant plus de 700 projets de veille et organisations de toute taille et de tout secteur d’activité.
25 janvier 2022